Au Cameroun, les préjugés sont nombreux. Et certains de ces préjugés sont tellement ancrés dans les habitudes qu’ils sont presque devenus « normaux ». Par exemple, ça n’étonne même plus d’entendre dire que les bassa sont sauvages ou bien que les béti sont soulards et infidèles. C’est devenu évident d’entendre dire que les bamoun sont sales, que les bamiléké sont chiches, ou que les « bamenda » sont à gauche – une façon gentille de dire bêtes.
À chaque groupe humain ou ethnique vivant sur le territoire, le camerounais a associé un défaut, une tare, une sorte d’insulte. Cependant, il y a également cette idéalisation des ressortissants de la région de l’Ouest – les bamiléké donc – que certains camerounais font et que j’associe à des préjugés.
Pour certains Camerounais, les bamiléké sont tous intelligents et travailleurs. Ils ont tous une prédisposition naturelle pour les mathématiques et sont très peu dépensiers – d’où leur légendaire chicheté. Il se dit que la femme bamiléké est soumise, sérieuse, travailleuse et respectueuse. Des êtres proches de la perfection donc.
Il n’est pas rare d’entendre des gens émettre le vœu d’épouser des bamiléké, de faire affaire avec des bamiléké, d’employer des bamiléké, de confier leur fortune à des bamiléké, d’avoir des bamiléké comme amis, etc.
La vérité c’est que généralement les personnes qui tiennent ces propos, ou qui y croient, n’ont jamais réellement vécu à l’Ouest du pays. Ce sont des personnes qui ont rencontré une ou deux personnes originaires de l’Ouest dans leur vie, et ont dressé le profil de tout ressortissant de l’Ouest à partir de ces quelques spécimens. C’est évidemment une grosse erreur.
Étant moi-même originaire de l’Ouest, et pour y avoir vécu 18 années consécutives, je peux dire qu’il y a plein de bamiléké paresseux, escrocs, fourbes, voleurs etc. D’ailleurs, l’un des plus célèbres feymen du Cameroun venait de l’Ouest, le fameux Koagne Donatien.
Chaque fois qu’on me parle du sérieux des filles bamiléké, je ne peux m’empêcher de penser à ces filles de mon quartier qui, encore au lycée, ont conçu et accouché. Ou encore à cette jeune fille qui sortait tous les jours de chez eux en tenue de classe pour aller passer la journée chez un gars dans le quartier voisin.
Je me suis toujours abstenu d’intervenir chaque fois que des gens, autour de moi, disaient à quel point les bamiléké sont ci ou ça, tellement j’avais la flemme d’engager la discussion avec eux pour leur demander s’il existait un peuple où tout le monde n’a que des qualités (ou des défauts).
Les préjugés ont la peau dure, et qu’ils soient négatifs comme c’est le cas la plupart du temps, ou bien positifs comme ce que j’entends de temps en temps au sujet des bamiléké, ils traduisent une certaine ignorance des réalités du pays et des groupes humains et culturels qui le constituent.
Fotso Fonkam (@petit_ecolier)

3 commentaires sur « CES « BONS » PRÉJUGÉS QUI M’INSUPPORTENT »

  1. Nice article, quoique je ne suis pas très d’accord sur ta vision des Bamiléké en ce sens que les préjugés qui prévalent sur eux sont généralement négatifs. En effet, même si on leur reconnait des qualités indéniables dans le monde des affaires ou dans le domaine intellectuel, on a souvent peur de leur fourberie supposée, de leur culte des crânes, on leur reproche une volonté de « tout pour eux rien pour les autres », et généralement les mariages avec eux sont découragés. Sur la fabrique à préjugés tribaux, je pense que nous perdons de l’énergie à les faire disparaître car ce sont des réflexes humains communs à tous les peuples ( en France, les basques sont comme ci, les corses comme ça, etc….). Le vrai défi est de pouvoir s’accorder ensemble sur ce qui fait de nous un peuple uni, de sorte que les préjugés deviennent des détails sans importance et cela vient du haut. Or, notre gouvernement est le premier à fonctionner en fonction des tribus….alors le peuple suit la brèche.

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